Module M412-S1 - TD n°1 : les règles de droit
Chapitre 1. La définition de la règle de droit et la différence entre le droit objectif et les droits subjectifs
1.1. Le droit objectif : notion et finalité
1.2. La notion d'ordre public
1.2.1. Données factuelles
1.2.2. Les solutions divergentes des tribinaux français
1.2.3. Questions
1.3. Question de synthèse
Chapitre 2. La distinction des règles de droit et des règles de morale
Chapitre 3. Les différentes branches du droit
Chapitre 4. Sites internet utiles à l'introduction du droit
Page d'accueil Table des matières Niveau supérieur Page précédente Bas de la page Page suivante

1.2.2. Les solutions divergentes des tribinaux français

 

    • L’ordre public pour la Cour de cassation

D’après  Aude Mirkovic, maître de conférences en droit privé à l’Université d’Evry :

« Des époux français ont eu recours à une mère porteuse aux États-Unis, en raison de l’infertilité de l’épouse et de l’interdiction de la pratique en France. Des embryons ont été alors conçus in vitro avec les gamètes du mari et ceux de la mère porteuse, et transférés chez cette dernière. Deux enfants naissent de la mère porteuse le 25 octobre 2000. Leurs actes de naissance, établis selon le droit californien, indiquent comme père et mère le couple français. Le père demande la transcription des actes au consulat de France à Los Angeles, ce qui lui est refusé. À la demande du ministère public (du procureur de la République), les actes de naissance des enfants sont transcrits, aux fins d’annulation, sur les registres de l’état-civil de Nantes, et le procureur de la République fait assigner les époux pour obtenir cette annulation. Le tribunal de grande instance de Créteil, dans un jugement du 13 décembre 2005, déclare irrecevable l’action du procureur de la République, décision confirmée par la Cour d’appel de Paris le 25 octobre 2007.

La question posée à la Cour de cassation était donc de savoir si le ministère public pouvait demander la nullité de la transcription sur les registres français d’état-civil des actes de naissance américains des enfants. La Cour de cassation répond de façon positive : le ministère public a bel et bien intérêt à agir, en raison de la contrariété à l’ordre public de ces actes dont les énonciations résultent d’une convention portant sur la gestation pour autrui.

Extraits du site http://www.libertepolitique.com  (juillet 2011)

    • L’ordre public pour le Conseil d’Etat

«  Alors que la Cour de cassation par trois arrêts du 6 avril 2011 a affirmé, sans ambages, que le refus de reconnaître l’effet en France de l’acte de naissance d’un enfant nés d’une mère porteuse ne portait jamais atteinte à l’intérêt supérieur de l’enfant, le Conseil d’Etat confronté à la question de l’entrée sur le territoire français d’un enfant dans la même situation n’hésite pas, dans une ordonnance du 4 mai 2011, à se ranger résolument du côté des droits de l’enfant.
L’arrêt est relatif à des jumelles nées en Inde de mère indienne et de père français pour lesquelles le père avait sollicité, auprès du consulat général de France à Bombay, la transcription de leur acte de naissance sur les registres d’état civil français et la délivrance d’un passeport. Le consul général a saisi le procureur de la République  près du tribunal de grande instance de Nantes d’une suspicion de naissances obtenues au terme d’une procédure de gestation pour autrui et a refusé la délivrance des passeports.
La mise en œuvre du principe de la primauté de l’intérêt supérieur de l’enfant dans toute décision le concernant, consacré par l’article 3-1 de la Convention internationale des droits de l’enfant dont l’applicabilité n’est plus sujette à discussion, n’est pas aussi simple qu’elle pourrait paraître en premier lieu. Il faut s’interroger sur la question des savoir quelle conception de l’intérêt supérieur de l’enfant il convient de faire prévaloir. Cette notion peut être entendue de manière abstraite, c'est-à-dire sous forme d’une règle générale, valable pour tout enfant, ou de manière concrète, c'est-à-dire sous forme de solution concrète et applicable à un enfant dans une situation donnée.

En ce qui concerne les enfants nés dans le cadre de l’exécution d’une convention de gestation pour autrui, la conception abstraite de l’intérêt supérieur de l’enfant aboutit à considérer que l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas de naître d’une mère porteuse et conduit à rejeter tout effet de cette convention, pour éviter notamment qu’il soit l’objet d’un conflit de filiation…

Le conseil d’Etat adopte une conception concrète mais il insiste aussi sur la portée limitée de la mesure ; Cette mesure est provisoire. Elle n’empiète pas sur les compétences réservées par la  loi à l’autorité judiciaire. Seule celle-ci est en effet compétente pour trancher les effets de l’acte de naissance étranger en France. … le juge se contente d’ordonner que soit délivré un document de voyage.

Le refus catégorique de la Cour de cassation de faire produire un quelconque effet aux actes de naissance étrangers des enfants issus d’une mère porteuse, aboutit à une impasse. Les enfants concernés sont certes autorisés à entrer en France avec celui qui est considéré en Inde comme leur père, mais pour être placés dans une situation juridique précaire. Leur père génétique, dont la paternité est reconnue en Inde ne sera pas reconnu comme tel en France. …

Une telle situation ne doit pas perdurer. Dès lors que les enfants ont été conçus, même si c’est dans des circonstances éminemment critiquables, par un Français, qui est prêt à assumer la charge , on ne peut admettre que l’intérêt des enfants est de vivre dans un orphelinat indien, au prétexte que le processus  qui a abouti à leur naissance est contraire à l’ordre public français et qu’en théorie l’intérêt d’un enfant  n’est pas de naître d’une mère porteuse ! Le problème doit être résolu par une coopération internationales renforcée en matière de droit des personnes et de la famille et non pas en sacrifiant les droits de l’enfant… »

(Extraits de «  l’intérêt supérieur de l’enfant né d’une convention de mère porteuse : le pragmatisme du Conseil d’Etat : de Adeline Gouttenoire, Professeur à l’Université Montesquieu- Bordeaux IV , Directrice de l’institut des Mineurs de Bordeaux. » site LEXBASE HEBDO n° 444 du 16 juin 2011 . Edition privée réf N° Lexbase : A0989HQP)

Page d'accueil Table des matières Niveau supérieur Page précédente Haut de la page Page suivante