Protection des droits de la personne – Respect du corps humain – Restes des personnes décédées – Atteinte – Caractérisation – Applications diverses – Exposition de cadavres à des fins commerciales
1re Civ., 16 septembre 2010, Bull. 2010, I, no 174, pourvoi no 09-67.456
C’est par le biais technique de l’article 955 du code de procédure civile – l’arrêt confirmatif adopte les motifs non contraires et non critiqués du jugement – que trouve son épilogue l’affaire dite de l’exposition, par une société privée, en février 2009, de cadavres et organes humains plastinés (« Our body » / « À corps ouverts »).
Dans cet arrêt, qui n’en est pas moins de principe, la Cour de cassation s’appuie en effet sur un motif des premiers juges – ayant relevé que la société organisatrice poursuivait un objectif commercial – pour énoncer, en droit, l’incompatibilité de ce fait constaté avec le devoir impératif de traiter les restes des personnes décédées avec respect, dignité et décence (article 16-1-1 du code civil, loi no 2008-1350 du 19 décembre 2008) et partant, dire justifié l’exercice des pouvoirs judiciaires d’interdiction ouverts par l’article 16-2 du même code et inscrits aux dispositifs. La solution retenue rend inutile de savoir si ceux dont les dépouilles étaient ainsi exposées avaient consenti de leur vivant à ce traitement post-mortem, terrain sur lequel le débat avait été largement porté en appel : peu importe, puisque nous sommes sur le terrain de l’ordre public.
Cette première application de l’article 16-1-1 nouveau concerne l’exposition de cadavres en eux-mêmes, et non des reproductions iconographiques, sauf alors à expulser des musées ou des manifestations culturelles maints tableaux (La leçon d’anatomie, La mort de Marat, et bien des scènes historiques ou de bataille…).
La solution ne concerne pas davantage, a priori, les « expositions non commerciales »(momies présentées à titre purement historique ou culturel, reliques montrées dans certains lieux de culte), sauf si elles venaient tout de même à manquer aux exigences de respect, dignité et décence. Enfin, l’article 16-1-1 du code civil, texte nouveau mais général, ne remet pas en question les dispositions spéciales antérieures, tels les articles L. 1211-1 et L. 1211-2 du code de la santé publique relatives aux cessions ou utilisations de corps humains à des fins médicales ou scientifiques, ou les adaptations jurisprudentielles de l’article 895 du code civil concernant le legs du corps à la science.
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