La preuve d’un licenciement verbal peut être faite grâce à la retranscription, par son destinataire, d’un message vocal laissé sur son répondeur, l’auteur ne pouvant ignorer que ses propos sont enregistrés.
Un salarié ayant été licencié pour faute grave saisit la juridiction prud’homale, estimant avoir fait l’objet, quelques semaines plus tôt, d’un licenciement verbal. Pour prouver ce licenciement, il fait retranscrire, par huissier de justice, un enregistrement vocal laissé par son employeur sur le répondeur de son téléphone portable. La cour d’appel fait droit aux demandes du salarié et dit le licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Rappelons ici que tout licenciement doit être notifié par lettre recommandée avec avis de réception, à défaut il est réputé sans cause réelle et sérieuse (C. trav., art. L. 1232-6).
L’employeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le caractère déloyal de ce mode de preuve. Le message laissé sur le répondeur d’un téléphone mobile n’est pas assimilable à un écrit et n’a pas, dans l’esprit de son auteur, vocation à être conservé. Et sa retranscription à l’insu de son auteur constituent donc, selon l’employeur, un procédé déloyal.
La Cour de cassation confirme l’arrêt de la cour d’appel, et rappelle d’abord que « l’enregistrement d’une conversation téléphonique privée, effectué à l’insu de l’auteur des propos invoqués, est un procédé déloyal rendant irrecevable en justice ce mode de preuve ». Elle précise, ensuite, pour la première fois qu’ « il n’en va pas de même de l’utilisation par le destinataire, des messages téléphoniques vocaux dont l’auteur ne peut ignorer qu’ils sont enregistrés par l’appareil récepteur.
La Cour fait donc une distinction très claire entre deux procédés distincts :
– l’enregistrement d’une conversation téléphonique, à l’insu de son auteur, qui reste un procédé déloyal (v. déjà Soc. 29 janv. 2008) ;
– la retranscription d’un message vocal laissé sur le répondeur du destinataire, et dont l’auteur ne peut ignorer l’enregistrement, qui constitue un mode de preuve recevable.
La Chambre sociale se prononce ici sur la reconnaissance de la loyauté du message vocal comme mode de preuve. L’important est de savoir si la preuve est obtenue ou non à l’insu de l’auteur et c’est en cela que cette décision est à rapprocher de la jurisprudence, désormais constante, relative au « SMS » (Soc. 23 mai 2007), la Cour estimant que l’utilisation du SMS n’est pas déloyale car, « l’auteur ne peut ignorer que ses messages sont enregistrés par l’appareil récepteur ».
Soc. 6 févr. 2013, 11-23.738
Références
■ Article L. 1232-6 du Code du travail
« Lorsque l'employeur décide de licencier un salarié, il lui notifie sa décision par lettre recommandée avec avis de réception.
Cette lettre comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur.
Elle ne peut être expédiée moins de deux jours ouvrables après la date prévue de l'entretien préalable au licenciement auquel le salarié a été convoqué.
Un décret en Conseil d'État détermine les modalités d'application du présent article. »
■ Soc. 29 janvier 2008, n°06-45.814.
■ Soc. 23 mai 2007, n°06-43.209, D. 2007. 2284, note Castets-Renard ; JCP S 2007. 1601, note Boss
Selon l’arrêt de la cour de cassation du 13 novembre 2012, la mise à pied conservatoire consiste à suspendre le contrat de travail d’un salarié dans l’attente de son licenciement. Cette mesure de procédure vise à préserver les situations de danger et de désordre que pourrait entraîner le maintien du salarié fautif dans l’entreprise. De ce fait, elle est généralement suivie d’un licenciement pour faute grave.
Pour les juges, plusieurs jours peuvent s’écouler pour permettre à l’employeur de mener à bien les investigations sur les faits reprochés et se déterminer sur la nécessité d’engager une procédure de licenciement pour faute grave. L’employeur n’a donc pas à envoyer une lettre de convocation à l’entretien préalable à un licenciement concomitamment au prononcé de la mise à pied conservatoire.
Dans cette affaire où les faits reprochés portaient sur un détournement de fonds, l’employeur a pu légitiment attendre 13 jours entre le prononcé de la mise à pied conservatoire et sa convocation à un entretien préalable à son licenciement.
Extraits de RF social octobre 2012