Georges Mathé, Le temps d’y penser, 1974 
      Il est, certes, des gens qui doutent que la  science puisse jamais faire le bonheur des hommes…Et, en effet, la course au  développement, qui apparait parallèle à la progression scientifique , induit  l’hyper–consommation, la pollution, de grands risques écologiques. 
        Mais, à mon avis, il faudrait éviter de  confondre science et développement, et dire, au contraire, que la menace vient  du trop peu de science. 
      Voyons les faits.
       Une comparaison objective du passé et des temps  modernes me parait le démontrer aisément : la condition humaine s’est  considérablement améliorée, surtout dans les pays développés, c’est-à dire  justement, là où on pratique la science. Cette amélioration est faite de la  mise en œuvre d’une infinité d’éléments de sécurité et de confort, de  communication, d’information. –lesquels donnant à chacun le goût d’une  existence meilleure, entraînent forcément plus de justice sociale.
      Je sais bien, les pays en voie de développement,  les régions les plus pauvres de l’Amérique latine, nous montrent des gens  heureux et sereins. Mais leur satisfaction ne vient-elle pas de leur ignorance  des progrès matériels du reste de l’humanité ? 
        Des Français, il est vrai, trouvent une joie, constante  et profonde dans une vie simple, naturelle en Corrèze…mais qu’en serait-il si  un médecin, armé de pénicilline, n’était prêt à leur porter secours en cas de  maladie grave […]
        Naturellement, l’industrialisation galopante, et  son corollaire, la pollution, peuvent conduire au désastre. […]
       Mais en quoi la science est-elle responsable de  tout cela ? Elle a apporté des moyens de bonheur, et ce sont les hommes  qui ont détourné ces moyens de leur objet, ne serait-ce qu’en les multipliant  d’une manière excessive.