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Chapitre 2. Testez-vous
2.1. Exercice
2.2. Questions
2.3. Corrigé et risques encourus
Chapitre 3. La méthode
Chapitre 4. Exercez-vous
Chapitre 5. Vous retenez
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2.1. Exercice

Le débat sur l'euthanasie en France : entre exception d'euthanasie et refus de l' acharnement thérapeutique
Moutel Grégoire. Etudes et Synthèses, 2000

Consulter l'article en ligne sur le site ETHIQUE ET SANTE du Laboratoire d’Ethique Médicale et de Médecine Légale de la Faculté de Médecine de l’Université Paris Descartes.

La législation française n'autorise pas l'euthanasie, et l'assimile à l'assassinat, mais par ailleurs le Code de déontologie médicale condamne l'acharnement thérapeutique. Entre ces deux voies, la question des modalités d’accompagnement en fin de vie ou lors des maladies incurables fait l’objet d’un vif débat social.

L'euthanasie proprement dite consiste en l'acte d'un tiers qui met délibérément fin à la vie d'une personne dans l'intention de mettre un terme à une situation jugée insupportable.

L'application stricte de la loi amène à qualifier l'euthanasie d'homicide volontaire, d'assassinat ou de non assistance à personne en danger. Mais les juridictions qui sont rarement saisies en la matière font preuve, lorsqu'elles condamnent, de la plus grande indulgence.

Le récent cas d’une infirmière qui aurait mis fin à la vie et aux souffrances d'une trentaine de ses patients a relancé le débat en France.

Un courant de revendication concernant le droit à mourir est très actif en France, favorable à l’euthanasie active et à la mis en place d’une législation en ce sens. Très rapidement, la question de la dignité est introduite dans la discussion: la dégradation de leur corps, la maladie, la souffrance, seraient pour les patients des atteintes à leur dignité. Ce problème de la dignité intervient également dans les dégradations corporelles que l'on voit en réanimation, mais aussi dans des pathologies fort heureusement très rares tel le "locked-in syndrom".

Certains médecins pratiquent, sans le dire, l'arrêt des traitements appelé euthanasie passive, d'autres ont reconnu publiquement avoir pratiquée l’euthanasie dite active.

Ainsi, une récente interview, de Bernard Kouchner, ministre de la santé, dans un hebdomadaire néerlandais, provoque des remous. Bernard Kouchner aurait déclaré avoir pratiqué l'euthanasie au cours de sa carrière de médecin. A la suite des réactions provoquées par cet article, le Ministre médecin a précisé avoir pratiqué des injections au Liban et au Vietnam et a donc précisé qu’il s’agissait de soins palliatifs en temps de guerre dans des conditions extrêmes qui n'ont rien à voir avec la situation du débat actuel en France. Mais cette explication n’a peut être considéré comme satisfaisante et en tout cas ne saurait clore le débat, ce qui d’ailleurs n’était pas la volonté du Ministre. Il a d’ailleurs indiqué qu'il ne présenterait pas prochainement de projet de loi sur l'euthanasie, mais qu’il souhaitait que les moyens et les formations soient mises en place pour accompagner les patients dans le cadre des soins palliatifs.

Le Pr Glorion, ancien président du conseil national de l’ordre des médecins, allant dans le même sens, insiste sur le fait que les médecins doivent être formés pour assurer la prise en charge des malades incurables et affirme, que pour le conseil qu’il présidait il est "hors de question" de légiférer sur l'euthanasie. L'article 38 du Code de déontologie: le médecin n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort. Le Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE) a récemment introduit la notion d' "exception d'euthanasie" : cette exception ne peut concerner que "des situations limites ou des cas extrêmes reconnus comme tels" par les médecins après une demande du patient "libre, répétée, exprimée oralement en situation ou antérieurement dans un document", quand les soins palliatifs se révèlent impuissants. Il s'agit non pas d'une dépénalisation, mais de la possibilité pour les juges de l'appréhender différemment: invoquée par l'équipe soignante, l'exception d'euthanasie, qui pourrait être prévue par la loi,"devrait faire l'objet d'un examen en début d'instruction ou de débats par une commission interdisciplinaire, chargée d'apprécier le bien-fondé des prétentions des intéressés". Cependant ce même CCNE, dans un avis du 24 juin 1991 a rappelé qu'une législation en la matière, même pour des cas exceptionnels, serait source d'interprétations abusives et incontrôlables.

Le dernier avis du Comité Consultatif National d'Ethique (CCNE) est une avancée considérable dans le domaine de l'euthanasie. En effet, plutôt que légiférer et construire des lois qui sont vite dépassées par l'avancée des sciences et des techniques, plutôt que s'inspirer d'une logique du droit pour donner une norme positive aux actions dans le champ de la biomédecine et de la santé, le comité propose qu'il soit possible " en certaines circonstances " de procéder des actions prohibées jusqu'alors par la communauté médicale.

Le Dr Maurice ABIVEN, pionnier des soins palliatifs en France souligne : " Aujourd'hui, malheureusement tout ce qui est légal devient moral » C’est la raison pour laquelle il rejoint comme de nombreux médecins le comité national d'éthique, parce qu'il incite à une réflexion éthique et ceci est très différent d'une loi qui serait à l'usage de tous et ôterait tout scrupule aux praticiens les plus laxistes ".

Soulignons enfin les arguments du corps médical, favorable souvent à l’euthanasie passive, mais qui refuse l’euthanasie active, sur l’argument que la vocation du médecin est de soigner la personne, d'aider à la vie et de ne jamais blesser la confiance que le patient peut mettre en lui, effet que pourrait induire une reconnaissance légale de l’euthanasie.

Le combat des médecins français porte à ce jour plus sur la reconnaissance du développement des unités de soins palliatifs, du traitement de la douleur, et de l’accompagnement en fin de vie à domicile ou en institution.

Ils soulignent enfin le refus de tout acharnement thérapeutique défini comme une obstination déraisonnable, refusant par un raisonnement buté de reconnaître qu'un homme est voué à la mort et qu'il n'est pas curable. La récente loi française visant à garantir le droit à l'accès aux soins palliatifs contient une disposition allant dans ce sens, lorsqu'elle indique que la personne malade peut s'opposer à toute investigation ou thérapeutique.

 

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