La concurrence imparfaite
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La formation du prix en régime d'oligopole

Pour comprendre comment un cartel (une entente) peut fixer un prix uniforme pour un produit donné (homogène - il ne s’agit pas ici de différenciation), il faut examiner la stratégie du cartel. Les membres du cartel vont confronter leurs coûts unitaires "globaux" (comme si ils étaient une seule et même entreprise) et confronter ces coûts unitaires à la demande de marché. Ils sont alors dans la position du monopole et ils vont donc bénéficier de la rente collective liée à la fixation d'un prix (recette moyenne) nettement supérieur au coût marginal. Il faudra alors décider du partage de cette rente de monopole. Ce partage est une source de conflits et les ententes ou cartels sont fondamentalement instables.

Si les prix des facteurs de production n’augmentent pas lorsque le cartel s’élargit, la courbe de coût marginal est la somme horizontale des courbes de coût marginal des diverses firmes et il en va de même de la courbe de coût moyen.
Puisque le secteur est un oligopole la demande est entièrement adressée à ces entreprises, et comme pour le monopole elle est décroissante avec le prix ce qui explique la forme des recttes moyennes (les prix) et marginales.
Ici, la production qui maximise le profit global des membres du cartel est Q0. de manière à ce que le coût marginal soit égal à la recette marginale (avant il y a un profit marginal positif, après le profit marginal est négatif). Le prix correspondant sera donc P0, qui est le prix du monopole.

Le cartel doit aussi répartir entre ses membres le total des ventes du secteur. Si l’objet du cartel est de maximiser son profit global, il répartit les ventes entre les firmes de telle sorte que soient égaux les coûts marginaux de chacune d elles. Le cartel pourrait procéder autrement et gagner davantage d’argent en répartissant la production entre les firmes de façon à réduire le coût de la production globale du cartel. Si le coût marginal de la firme F1 est plus élevé que celui de la firme F2, le profit global sera accru en transférant une partie de la production de F1 vers F2.

Mais cette nouvelle répartition n’aura sans doute pas lieu, car les décisions du cartel sont le résultat de négociations entre des firmes dont les intérêts et les capacités sont divers.
C’est en fait une négociation politique où ces firmes tentent d’user de leur influence. Celles qui ont le plus de poids et les meilleurs négociateurs sont susceptibles de bénéficier des plus forts quota de vente, même si cela doit relever le coût global du cartel. De même, on peut penser que des firmes dont les coûts sont élevés auront des quotas de ventes plus importants que ce qu’éxigerait une minimisation des coûts, car elles n’accepteront pas les petits quotas que justifierait cependant leur position. Dans la pratique, les ventes sont souvent attribuées en fonction des ventes passées, ou de la capacité de production. Il arrive aussi que le marché du produit soit divisé en zones géographiques, chaque firme ayant son secteur d’activité dans tel pays ou telle région.

Une firme qui abandonne un cartel - ou qui triche en secret - peut accroître son profit tant que les autres firmes ne font pas de même et tant que le cartel n’inflige pas de pénalité. Mais si toutes les firmes agissent de la même façon, le cartel se désagrège. L’existence même d’un cartel est donc constamment menacée. Ses membres sont incités à ne pas observer ses règles et, si certains le font, d’autres peuvent les imiter. Les rabais occultes consentis par certains tricheurs, ou même ouvertement par des protestataires, réduisent les ventes des membres fidèles, qui sont ainsi poussés à faire comme eux. En fin de compte, le cartel peut disparaître. L’exemple le plus évident de ces difficultés est probablement celui représenté par les stratégies des pays membres de l’OPEP depuis plus de trente ans.