1) Tous les économistes acceptent que la demande de monnaie réponde au motif de transaction.
La
demande de monnaie est donc proportionnelle à la quantité de produits
échangés et aux prix de ces produits, c'est-à-dire le PIB ou le revenu
national.
Comme la modernisation du système bancaire a rendu
la gestion des moyens de paiement plus facile, en permettant
d’échelonner l’utilisation du revenu dans le temps la théorie de la
demande de transaction a été aménagée, les économistes considèrent
ainsi que (toutes choses égales par ailleurs) la demande de monnaie de
transaction diminue quand le taux d’intérêt augmente [1]
C’est ainsi que sont apparus les premiers compte courants rémunérés,
les banques utilisant les dépôts inutilisés sur les comptes courants de
leurs clients pour acheter des titres du marché monétaires et percevoir
la rémunération qui serait ensuite en partie ou en totalité versée aux
clients. [2]
Bien
entendu il faut prendre en compte les frais associés à l’achat et à la
vente des titres, et le temps consacré à cette gestion qui sera
d’autant plus grand que l’agent s’efforcera de réduire la quantité de
monnaie non rémunérée en adaptant les placements aux dépenses.
Si le gain réalisé par le placement (qui dépend du taux d’intérêt) est
plus élevé que le coût de gestion (ce qui est d’autant plus vrai que le
revenu est plus élevé), la
demande de monnaie de transaction devient en plus de sa dépendance aux
prix et au PIB une fonction décroissante du taux d’intérêt. [3]
2) Tous prennent aussi en compte le fait qu’on peut détenir de la monnaie par précaution, par exemple pour faire face à des besoins inattendus.
Le montant des réserves conservées en monnaie dépend du niveau de
revenu. Plus le revenu est élevé et plus il est facile de conserver une
encaisse de précaution. La demande de monnaie de précaution est proportionnelle au revenu.
Comme pour le motif de transaction les progrès du système bancaire
modifie ce résultat. La conclusion est la même : toutes choses égales
par ailleurs, la demande de monnaie de précaution diminue quand le taux d’intérêt augmente.
3) S’il y a accord sur ces deux motifs de demande de monnaie, il y a une opposition forte sur le motif de spéculation.
La monnaie peut-elle être considérée comme un actif ayant le même statut que les titres financiers ?
Les agents procèdent-ils à un arbitrage entre liquidité et placements ?
La réponse est très importante parce qu’elle modifie complètement
l’analyse du partage du revenu entre consommation, épargne et formes de
l’épargne (liquidités ou titres).
La théorie économique a longtemps rejeté l’idée que la monnaie pouvait
être considérée comme un actif comparable aux titres. La monnaie ne
pouvait être qu’un instrument d’échange et rien d’autre. C’est la
version habituelle de la neutralité de la monnaie ou/et de la théorie quantitative.
L’analyse conduite par John Maynard Keynes
a renversé cette approche en introduisant une nouvelle théorie de la
consommation et en accordant à la monnaie un nouveau statut.
En présentant une théorie quantitative modernisée, Milton Friedman
a conduit une sévère critique de l’analyse keynésienne. S’il aboutit à
des conclusions radicalement opposées pour la politique monétaire, sa
théorie de la demande de monnaie est pourtant plus proche de celle de
Keynes que de la théorie quantitative ancienne.
Pour une présentation élémentaire de ces trois théories vous pouvez consulter Les théories monétaires.
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Notes :
[1]
Le revenu perçu est dépensé progressivement pendant la période. Il est
donc raisonnable de ne pas conserver la totalité du revenu en monnaie
par exemple en décidant de placer la moitié de ce revenu mensuel en
titres qui seront vendus en milieu de période. La part du revenu placée
de cette manière dépend du taux d’intérêt servi pour le placement.
[2]
En France les banques peuvent rémunérer les comptes courants depuis
2005. Cela n’a jusqu’à présenta pas véritablement modifié les
comportements des titulaires de compte. La rémunération est
généralement assez faible pour qu’il soit préférable d’utiliser à côté
du compte courant un livret d’épargne.
[3] Plus le taux d’intérêt est élevé, plus il devient rationnel de ne pas conserver de liquidité.