1 Définition
Les moteurs pas à pas sont des moteurs destinés au positionnement angulaire de charges mécaniques. La commande de ces moteurs, permet de les faire tourner de façon discontinue par fraction de tour. L'angle élémentaire de rotation est appelé pas de la machine.
Il existe plusieurs technologies pour ces moteurs. Les différents types ont en commun :
v un stator à pôles saillants magnétisé par plusieurs bobinages
v un rotor à pôles saillants sans bobinage tournant
Plusieurs principes de construction sont utilisés.
2 Moteur à réluctance variable
Le stator comporte un nombre pair Ns de dents magnétisées par Ns enroulements; ceux-ci sont associés par 2, par 4, par 6 ... pour créer bs bobinages. Le rotor est formé d'un empilage de feuilles de tôles dans lesquelles on a découpé un nombre de dents Nr différent de celui du stator.
La fig.1 représente une machine à Ns = 8 dents et Nr = 6 dents.

Créons quatre bobinages en groupant deux à deux les bobines diamétralement opposées.
v Alimentons d'abord la bobine A, A' pour créer un pôle Nord en A et un pôle Sud en A'. Le champ magnétique créé aimante le rotor; d'après la règle du flux maximal, l'action du champ sur le rotor crée un couple l'amenant à une position d'équilibre stable telle que le flux soit maximal; le courant magnétisant étant fixé, le flux est F = S n i / R , R étant la réluctance du circuit magnétique quasi égale à celle de l'entrefer. La réluctance doit être minimale; celle-ci étant proportionnelle à la longueur de l'entrefer, le rotor prend une position d'équilibre telle qu'une dent du rotor vienne en face d'un dent magnétisée du stator; par exemple, sur la fig.1a, les dents a et a' viennent respectivement en face de A et A'.
v Alimentons maintenant les bobines B et B'; suivant la même règle, la dent la plus proche de B vient en face de ce pôle. Sur la fig.1b, nous voyons l'alignement de B et b ainsi que de B' et b'. Le rotor a tourné d'un pas.
En alimentant successivement les quatre bobines, nous pouvons obtenir tous les angles multiples du pas. Les dents stator sont décalées de qs = 360 / 8 = 45 ° et celles du rotor de qr = 360 / 6 = 60° ; à chaque pas, le rotor tourne de qr - qs = 15°; pour faire un tour, il faut exécuter 360 /15 = 24 pas; nous dirons que le moteur a 24 pas par tour.
De façon générale, le nombre de pas par tour est 2.Nr. Ns / k.|Ns - Nr| , k étant le nombre de dents dont les bobinages sont alimentés simultanément.
Notons que dans ce type de moteur, le sens de rotation est fixé uniquement par l'ordre d'alimentation et des bobinages, indépendamment du sens du courant dans les bobines.
3 Moteur à aimant permanent
Dans ce type de moteur, le stator est identique au précédent : Ns dents magnétisées par Ns bobines groupées pour faire bs bobinages. Le rotor est un aimant permanent à Nr pôles. Représentons par exemple une machine à 4 dents au stator et deux pôles au rotor.
Alimentons les dents A et A' pour créer un pôle Sud en A et Nord en A'. Deux pôles de noms opposés s'attirent; le rotor place donc son pôle n en face de A et son pôle s en face de A'. De même si nous créons un pôle Sud en B et Nord en B', le rotor tourne d'un quart de tour pour placer son pôle n en face de B.
Partant de la position de la fig.2a, l'inversion du courant dans les bobines fait tourner le rotor de 180°. On a donc ici quatre positions d'équilibre soit quatre pas par tour.
Nous pouvons également fonctionner en demi-pas; en créant des pôles Sud en A et B, des pôles Nord en A' et B', le rotor s'aligne sur la bissectrice des pôles en tournant de 45° soit la moitié du pas (fig.2c).
De façon générale le nombre de pas par tour est Ns.Nr / 2; contrairement aux moteurs à réluctance, la position du rotor dépend du signe des courants dans les bobines.
4 Moteurs hybrides
Le stator est toujours le même : Ns dents portant chacune une bobine. Le rotor possède deux couronnes de Nr dents chacune; les deux couronnes sont placées aux deux extrémités du rotor et sont décalées de 180 / Nr degrés pour qu'une dent d'une couronne se place entre deux dents de l'autre ( fig.3). Le rotor est magnétisé par une bobine fixe placée suivant l'axe de la machine. Le courant continu circulant dans ce bobinage permet de maintenir la polarité de chaque couronne durant la rotation. Ce bobinage peut être remplacé par un aimant permanent.
Si nous créons un pôle Sud en A et un pôle Nord en A', le rotor prend une position telle qu'une dent n se place en face de A et une dent s' en face de A' (fig.3.a). La rotation d'un pas est obtenue comme pour le moteur à aimant permanent (fig.3.b). Chaque pas fait ici 30° et il y a 12 pas par tour.
De façon générale, les moteurs hybrides ont Ns.Nr pas par tour; la position du rotor dépend du sens du courant dans les bobines du stator.
5 Modes d'alimentation
Nous étudions les courants à faire circuler dans les bobinages du stator pour pouvoir commander la position du rotor. Nous supposons que le stator possède quatre dents magnétisées par quatre bobines regroupées en deux enroulements l'un parcouru par i et l'autre par i'.
Divers modes d'alimentation sont possibles suivant le fonctionnement désiré et le type de moteur
5.1 Alimentation phase par phase
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Nous alimentons une seule phase à la fois sous le courant ± î; les positions d'équilibre correspondent à l'alignement d'une dent rotor avec la phase alimentée. Chaque modification d'un courant fait tourner le moteur d'un pas. |
alimentation unipolaire (moteur à réluctance)
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alimentation bipolaire
(moteur à aimant ou hybride)
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Mode 1 : |
Mode 1 : |
5.2 Alimentation 2 phases à la fois
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Nous alimentons simultanément deux phases consécutives, l'une sous +î l'autre sous -î (fig.4.c). Les positions d'équilibre correspondent aux bissectrices des phases, c'est à dire aux demi-pas. Si la machine est peu saturée, le champ magnétique résultant est Ö2 plus grand que dans le mode 1; il en est de même pour le couple. Chaque modification des commandes fait tourner le moteur d'un pas. |
Mode 2 :
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5.3 Alimentation en demi-pas
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Nous alimentons la bobine 1, puis simultanément les bobines 1 et 2, puis la bobine 2 seule ... (fig.4.d en mode unipolaire et 4.e en mode bipolaire). Nous utilisons toutes les positions d'équilibre de pas et de demi-pas; chaque modification des commandes fait tourner le moteur d'un demi-pas. |
alimentation unipolaire (moteur à réluctance) |
alimentation bipolaire (moteur à aimant ou hybride) |
Mode 3 : |
Mode 3 : |
L'inconvénient du mode 3 est de ne pas avoir le même couple pour toutes les positions. Le mode 4 lisse le couple pour toutes les positions : pour les positions de demi-pas, deux bobinages sont alimentés et la somme de leur champs en quadrature est Ö2 plus grande que lorsqu'un seul bobinage est alimenté; pour avoir le même couple pour toutes les positions, il suffit d'alimenter un seul bobinage sous î' =Ö2.î puis deux bobinages sous î (fig.4.fet 4.g). |
alimentation unipolaire
(moteur à réluctance)
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alimentation bipolaire
(moteur à aimant ou hybride)
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Mode 4 : |
Mode 4: |
5.4 Alimentation en mini pas
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Pour les moteurs à aimants permanents ou hybrides il est possible d'obtenir un fractionnement des pas en n intervalles; pour cela on alimente le bobinage 1 sous i = î.cos( k.p/2.n) et le bobinage 2 sous i' = î.sin(k.p/2.n), k prenant les valeurs entières de 0 à n-1. Le champ résultant a toujours le même module et fait l'angle k.p/2.n avec l'axe de la dent A. Il y a donc n positions d'équilibre par pas. |
Mode 5 :
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6 Circuits de commande
L'alimentation idéale devrait fournir à chaque bobinage un créneau de courant; en raison de l'inductance propre des bobines, le courant ne peut être discontinu. Pour chaque bobine, on devra :
v établir le plus rapidement possible le courant au changement de pas
v maintenir le courant constant durant la rotation en dépit des f.é.m. induites par le déplacement du rotor
v éviter l'apparition de courants parasites dans les autres bobines couplées magnétiquement à la phase alimentée
v couper le plus rapidement possible le courant pour quitter un pas.
Plusieurs types d'alimentations sont possibles suivant le type de moteur (unipolaire pour les moteurs à réluctance, bipolaire pour les autres types) et suivant les performances requises.
6.1 Alimentation unipolaire en tension
Chaque phase est modélisée par une résistance R et une inductance L. L'ensemble est alimenté sous la tension Vcc à travers un transistor fonctionnant en commutation (fig.5a).

Lorsque le transistor est saturé, le courant i augmente exponentiellement avec la constante de temps L/R, jusqu'à la valeur de régime permanent î = Vcc / R. Le temps d'établissement à 5 % près est de 3.L / R. Au blocage de T, la diode de roue libre D permet la démagnétisation du bobinage.
La fig.5b donne l'allure du courant et de la tension pour Vcc = 6 V, R = 12 W et L = 15 mH. La constante de temps étant de 1,25 ms le régime transitoire dure environ 4 ms; on doit rester sur chaque pas pendant un temps au moins égal à 4 ms. Pour un moteur 24 pas par tour, il faut environ 100 ms pour faire un tour soit une vitesse maximale de 10 tr / s ou 600 tr / min; ce mode d'alimentation n'est pas performant.
On peut diminuer la constante de temps en plaçant une résistance en série avec la bobine mais cela augmente les pertes par effet Joule.
On peut améliorer ce mode de commande en utilisant une double alimentation pour augmenter la tension durant le temps de montée du courant. La fig.6a donne le montage utilisé. Pour établir le courant, on sature simultanément les transistors T et T'; la tension V'cc étant supérieure à Vcc, la diode D' est bloquée et la phase est alimentée sous V'cc ; le courant croit avec une pente à l'origine R.V'cc / L supérieure à celle obtenue avec un une alimentation simple.


Lorsque le courant atteint une valeur supérieure à la valeur nominale, on commande le blocage de T' pour revenir à une alimentation sous tension nominale.
La démagnétisation est assurée par la diode zéner Dz; la tension de démagnétisation Vd + Vz est augmentée et le temps de coupure du courant diminué. La fig.6b donne les graphes pour V'cc = Vz = 12 V, les autres grandeurs étant identiques à celles utilisées pour l'exemple précédent. Le courant atteint sa valeur nominale en 0,36 ms et se coupe en 0,51 ms; il est alors possible de réduire la durée d'un pas à 1 ms onc avoir une vitesse quatre fois plus grande que dans le montage simple alimentation.
Le montage est identique à celui de l'alimentation en tension en utilisant en plus une diode zéner pour la démagnétisation; la commande du transistor est de type à fourchette de courant.


Le moteur est alimenté sous une tension Vcc plus grande que la tension nominale pour assurer une montée rapide du courant. Dès que la commande valide l'alimentation de la phase, le courant croît jusqu'à une valeur Imax supérieure au courant nominal; le retour courant provoque alors le blocage du transistor; l'enroulement se démagnétise jusqu'à ce que le courant atteigne la valeur Imin inférieure au courant nominal. Le retour courant sature de nouveau le transistor jusqu'à ce que le courant atteigne la valeur Imax. Ce processus ce répète tant que la commande valide le pas.
Ce mode d'alimentation est préférable à ceux précédemment décrits car en contrôlant le courant, on contrôle le couple moteur. L'inconvénient est de multiplier les phases de démagnétisation où l'énergie est dissipée dans la diode zéner; pour améliorer le rendement, il est possible de récupérer l'énergie de démagnétisation.
7 Caractéristiques des moteurs pas à pas
Ces caractéristiques sont mesurées lorsque le moteur est à l'arrêt avec ou sans alimentation; les constructeurs donnent:
Ø le courant nominal par phase
Ø le couple de maintien : c'est le moment du couple qu'il faut exercer sur le rotor pour le faire tourner lorsque deux phases consécutives sont alimentées sous courant nominal, c'est à dire pour lui faire quitter la position de demi-pas.
Ø le couple de détente : c'est le moment du couple qu'il faut exercer sur le rotor pour le faire tourner lorsque le stator est en circuit ouvert; ce couple est nul pour les moteurs à réluctance; pour les moteurs à aimants ou hybrides, ce couple existe en raison de la règle du flux maximal qui crée un couple maintenant les positions de pas mais pas les positions de demi-pas.
Ces caractéristiques fixent les performances lors du changement de pas.
Lorsque le moteur est commandé à la fréquence f, l'angle varie suivant le graphe représenté ci-dessous:
A chaque impulsion, le rotor tourne d'un pas de 15° avec un régime transitoire de type oscillant amorti.
Ce graphe permet de définir les zones de fonctionnement dans le plan couple en fonction de la vitesse ou de la fréquence de commande (fig.11).

v Dans la zone 1, le fonctionnement est possible mais le moteur vibre fortement, la fréquence de commande étant proche de la fréquence propre.
v Dans la zone 2, il y a résonance et le moteur oscille avec une forte amplitude; cette zone ne peut être utilisé.
v La zone 3 correspond à la zone où il faut se situer pour démarrer et arrêter le moteur sans perte de pas.
v La zone 4, dite de survitesse, peut être atteinte en régime permanent.
v Dans la zone 5, le couple ou la fréquence est trop élevé et le moteur ne suit plus la commande.
8 Comparaison des types de moteurs
Ø les moteurs à aimants permanents ont un nombre de pas par tour moyen; l'alimentation doit être de type bipolaire.
Le moment d'inertie et le couple massique sont élevés.
Ø les moteurs hybrides ont un grand nombre de pas par tour (jusqu'à 500).
Le moment d'inertie est moyen et le couple massique élevé.
Le choix d'un moteur se fait en fonction :
v du nombre de pas par tour désiré
v du moment d'inertie de la charge: le moment d'inertie du moteur doit être du même ordre de grandeur que celui de la charge ramené sur l'arbre moteur
v du couple et de la vitesse désirés.