La
réalisation d’un système de prix assurant un équilibre général de
marché qui est aussi une situation optimale collectivement suppose que
les avantages et les coûts issus d’une action individuelle ne
concernent que l’agent qui l’effectue. Les économistes disent que les
coûts et avantages privés (ceux sur lesquels l’agent fonde son calcul
individuel) coïncident alors avec les coûts et avantages sociaux (ceux
qui doivent être pris en compte au niveau de la collectivité tout
entière).
Dans l'économie réelle, les agents peuvent être
interdépendants sans que cette interdépendance puisse être prise en
compte par un mécanisme marchand.
Il en va ainsi quand les
droits de propriété sont mal définis ce qui est le cas des situations
où se manifestent des effets externes et de celles qui correspondent à
certains produits, les biens collectifs.
1) Les effets externes ou externalités
Une
externalité se manifeste lorsque l’action de consommation ou de
production d’un agent a des conséquences sur le bien-être d’au moins un
autre agent sans que cette interdépendance soit reconnue par le système
de prix, et donc sans donner lieu à compensation monétaire.
La
dernière partie de la définition est essentielle car le marché permet
d’intégrer de nombreuses interdépendances, c’est même sa raison d’être
: le producteur qui augmente sa production de manière importante ou qui
apparaît sur un marché dont il était absent, influence la formation du
prix du produit et de ce fait "modifie le bien-être des consommateurs
et des autres producteurs, mais il ne s’agit pas d’un effet externe
puisque cette décision est "reconnue par le système de prix".
Le consommateur ou le producteur responsable de l’effet externe n’a aucune raison d’intégrer dans sa décision (son calcul avantages-coûts) la diminution ou l’amélioration du bien-être pour les autres agents.
Les externalités positives (amélioration du bien-être des autres) ou
négatives (diminution du bien-être des autres) font naître un écart
entre le rendement social et le rendement privé de l’activité. De même
le coût privé (celui qui est supporté par un agent isolé du fait de son
activité ou de sa décision) n'est pas égal au coût social (celui qui
est supporté par d'autres agents n'ayant aucune part dans la
réalisation de cette activité).
Lorsqu’une activité s’accompagne d’une externalité positive (comme la
recherche développement, la vaccination, l’éducation, les assurances
sociales...) elle devrait être encouragée puisque le bien-être
collectif est amélioré par cette activité. Mais comme elle n’est pas
prise en compte par le marché, le producteur n’est pas inciter à
produire plus (il n’y a pas de rémunération pour sa contribution).
Lorsqu’une activité s’accompagne d’une externalité négative (comme la
pollution) elle devrait être découragée puisque le bien-être collectif
est réduit par cette activité. Mais comme elle n’est pas prise en
compte par le marché, le producteur n’est pas incité à produire moins
(il n’y a pas de sanction négative pour sa contribution).
Pour rapprocher coûts sociaux et coûts privés, les pouvoirs publics
interviennent en règlementant la production ou/et la consommation pour
internaliser les effets externes (par exemple par un système de taxes
pour les activités polluantes) et parfois ils assurent eux mêmes la
production et la distribution (services d'éducation et de santé par
exemple).
2) Les biens publics ou biens collectifs
Les produits destinés à être vendus ont généralement deux propriétés fondamentales :
- la rivalité, leur consommation par un individu rend impossible la consommation par un autre individu
- la possibilité d’exclusion par le marché, pour disposer du bien il faut accepter de payer son prix.
Certains biens et services n’ont qu’un ou aucun de ces deux caractères. Lorsque
des biens et services sont caractérisés à la fois par la non rivalité
et l’impossibilité d’exclusion par le marché ce sont des "biens
publics" ou "biens collectifs".
Un bien est dit
collectif quand sa consommation par un agent ne réduit pas les
possibilités de consommation par les autres agents. Son usage est
indivisible, tout le monde consomme ou peut consommer librement ce
bien, et chacun des consommateurs consomme la totalité du bien, il n'y
a pas de rivalité entre les consommateurs.
L’exemple traditionnel des manuels d’économie est celui de l’éclairage
public. Tous ceux qui passent dans une rue éclairée par les équipements
de la commune bénéficie de toute la lumière sans que cela diminue le
moins du monde l’éclairage pour les autres passants.
Cette situation rend impossible l’exclusion par le marché : comment
faire payer un passant qui peut répondre simplement qu’il n’a rien
demandé. S’il est rationnel il va naturellement adopter un comportement
de passager clandestin (free rider).
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Rivalité
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Non rivalité
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Exclusion
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Biens et services privés purs
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Biens et services mixtes
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Non exclusion
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Biens et services mixtes
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Biens et services collectifs purs
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Comme
il ne peut pas y avoir de prix de marché pour un bien collectif pur
(parcs publics, défense nationale, diplomatie...) ou pour les biens et
services collectifs mixtes caractérisés par la rivalité et
l’impossibilité d’exclusion (parce qu’ils sont indivisibles), aucune
entreprise privée ne peut assurer la production de ces biens et
services.
La production par les administrations publiques ou des
entreprises publiques, ou encore par des entreprises privées
concessionnaires de cette activité est forcément financée par des
prélèvements obligatoires. Ce sont les contribuables, qu'ils soient ou
non usagers du biens collectifs qui vont financer cette production.
Bien entendu ce n'esrt pas parce qu'il n'y a pas de prix, que la
production doit se faire sans recherche d'efficacité, mais celle-ci ne
se mesure pas par un profit privé. Il faut essayer d'apprécier
l'amélioration du bien-être collectif autorisé par la production du
bien collectif.
3) Les monopoles naturels
Une entreprise bénéficie d'une position de monopole naturel
quand elle peut satisfaire l’ensemble de la demande à moindre coût.
C'est le cas lorsque les rendements d'échelle sont croissants : plus la
production est importante plus le coût moyen est faible. Cette
situation apparaît chaque fois qu'il y a des coûts fixes importants ce
qui est le cas dans la plupart des activité en réseaux (transports,
communications...). De ce fait les concurrents éventuels ne peuvent pas
produire à des conditions aussi avantageuses en raison de la lourdeur
des coûts fixes.
Le comportement du monopole est souvent résumé par cette formule : le monopole vend peu et cher.
Il faut comprendre que ce jugement porte sur la comparaison avec la
situation de la concurrence pure et parfaite. Ainsi, le monopole est
source d’inéfficience : il y a gaspillage de ressources, la production
n’est pas aussi élevée qu’elle pourrait l’être et et le prix supérieur
à ce qu’il serait en concurrence parfaite.
On peut alors penser qu'il faut confier à des entreprises publiques la
production de ces biens et services dont le marché ne peut pas être
concurrentiel.