Dans la "Théorie générale de l'emploi, de l'intérêt et de la
monnaie, il y a deux mécanismes multiplicateurs : un multiplicateur
d'emplois, un multiplicateur d'investissement.
Lire le texte
« En
des circonstances données, un rapport défini, qui sera
appelé Multiplicateur, peut être établi entre le revenu et
l'investissement et, sous le bénéfice de certaines simplifications,
entre l'emploi total et l'emploi directement affecté à l'investissement
(que nous appellerons l'emploi primaire). Cette nouvelle étape est une
partie intégrante de notre théorie de l'emploi car, la propension à
consommer étant donnée, elle établit un rapport précis entre le flux
d'investissement et les volumes globaux de l'emploi et du revenu »
(page 130 édition Payot 1968).
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L'idée est empruntée à
Richard Kahn (économiste anglais - 1905
- 1989 - qui travaillait avec
Keynes à Cambridge) et
Keynes
s'y réfère directement (l'article de
Kahn "La relation
entre l'investissement intérieur et le chômage" date de 1931 -
Economic Journal).
Keynes raisonne en courte période de sorte que les variations du
revenu réel (global) ne peuvent provenir que des variations de la
quantité de travail.
Lire le texte
« Les fluctuations du revenu réel examinées dans cet ouvrage
sont celles qui ont pour cause l'application de quantités différentes
d'emploi (c'est-à-dire d'unités de travail) à un équipement en capital
donné; ainsi le revenu réel augmente et diminue en même temps que le
nombre d'unités de travail employées ». (Keynes, p. 131).
Si le revenu additionnel créé par l'utilisation d'une plus grande
quantité de travail se transforme en supplément de demande c'est à
cause de la définition et des caractéristiques de la propension
marginale à consommer (dans le texte suivant la lettre d indique la
différentielle et par exemple
dCs/dRs est la dérivée de la
consommation par rapport au revenu - le "s" est là pour signifier que
le revenu et la consommation sont mesurés en unité de salaire).
« Nous prendrons donc dCs/dRs comme définition de la propension
marginale à consommer. Cette quantité est d'une importance
considérable, parce qu'elle nous indique comment le prochain
accroissement de production se partagera entre la consommation et
l'investissement. Car dRs = dCs + dIs, où dCs et dIs sont les
accroissements de la consommation et de l'investissement; par suite, on
peut écrire dRs = k.dIs, où 1-1/k représente la propension marginale à
consommer.
Nous appelerons k le multiplicateur d'investissement. Il nous indique
que, lorsque qu'un accroissement de l'investissement global se produit,
le revenu augmente d'un montant égal à k fois l'accroissement de
l'investissement » (Keynes, p. 132).
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On déduit des relations précédentes la valeur habituelle du
multiplicateur k = 1 / 1-c.
La différence avec le multiplicateur de
Kahn est qu'ici la
liaison n'est pas établi entre le supplément initial d'emplois et le
total des emplois créés par les effets de la distribution des revenus
mais entre la valeur du supplément d'invsetissement (équivalente à
celle du supplément de dépenses liée aux emplois créés initialement) et
celle du revenu.
Keynes se pose immédiatement la question du financement de ce
supplément de dépenses pour créer des emplois dans le cadre des
investissements nouveaux. La solution c'est l'épargne induite par
l'augmentation des revenus.
Lire le texte
« Un accroissement de l'investissement mesuré en unités de
salaire ne peut se produire sans que le public consente à accroître ses
épargnes mesurées en unités de salaires. En règle générale, le public
n'y consentira que si son revenu global mesuré en unités de salaire
croît. Son effort pour consommer une partie de ses revenus
supplémentaires stimulera la production jusqu'à ce que le nouveau
montant et la nouvelle répartition des revenus laissent une marge
d'épargne assez grande pour balancer l'accroissement de
l'investissement. Le multiplicateur indique de combien il faut que
l'emploi du public augmente pour produire un accroissement de revenu
qui suffise à lui faire consentir le surcroit d'épargne nécessaire et
ce coefficient est fonction de ses tendances psychologiques. L'épargne
étant la pilule et la consommation la confiture, il faut que le
supplément de confiture soit proportionné à la dimension de la pilule
additionnelle. Si les tendances psychologiques du public sont bien
celles que nous supposons, nous avons établi ici la loi qu'un
accroissement de l'emploi consacré à l'investissement stimule
nécessairement les industries travaillant pour la consommation et
détermine un accroissement total de l'emploi qui est un multiple de
l'emploi primaire requis par l'investissement lui-même » (Keynes,
p. 135).
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Dans la logique keynésienne l'égalité entre épargne et investissemnt
relève à la fois :
- des définitions, il s'agit donc d'une identité comptable puisque le
revenu est partagé entre dépenses de consommation et épargne et que la
production (qui est l'autre face du revenu) est destinée à la
consommation et à l'investissement
- du circuit économique puisque le mécanisme multiplicateur en
augmentant le revenu entraîne une augmentation équivalente à
l'investissement initial de l'épargne. L'investissement induit
l'épargne..
L'épargne n'est pas une contrainte puisqu'elle s'ajuste, en revanche le
désir d'épargne (la modification de la propension à consommer) peut
aggraver la crise. Si les agents sont inquiets (à juste titre si la
situation économique se dégrade) ils peuvent être tentés d'épargner ce
qui aggrave la crise pour
Keynes. C'est ce qui explique les
exhortations de
Keynes lors des interventions qu'il fait à la
BBC : il encourage les ménagères à dépenser.
Cela implique aussi que les entrepreneurs ne feront pas
d'investissements nouveaux s'ils pensent que les consommateurs
utiliseront le supplément de revenu lié à l'augmentation de l'emploi à
autre chose qu'à acheter leurs produits ou qu'ils réduiront leur
consommation.
Lire le texte
« Si on veut appliquer sans restrictions ce qui précède à
l'effet d'un accroissement des travaux publics (par exemple) il faut
supposer que cet accroissement n'est compensé ni par une diminution de
l'investissement en d'autres directions ni par un changement
concommitant de la propension de la communauté à consommer »
(p. 136).
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Il sait de plus que l'effet multiplicateur s'arrête lorsque toutes les
heures de travail disponibles sont pleinementt employées.
Lire le texte
« Lorsque le plein emploi est réalisé, si on cherche à
accroître encore l'investissement, les prix nominaux tendent à monter
sans limite, quelle que soit la propension marginale à consommer; on
est parvenu, en d'autres termes, à un état d'inflation véritable.
Jusque là la hausse des prix s'accompagne d'un accroissement du revenu
réel global » (Keynes, p. 136).
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Il sait aussi qu'il peut y avoir un
"effet de retour financier"
si le financement de l'investissement entraîne une tension sur les taux
d'intérêt..
Lire le texte
« La méthode utilisée pour financer ladite politique ainsi que
l'accroissement de la circulation exigé par l'emploi additionnel et la
hausse des prix qui l'accompagne, peuvent avoir pour effet d'élever le
taux de l'intérêt et par suite de ralentir l'investissement en d'autres
directions, si l'autorité ne prend pas les mesures nécessaires »
(p. 136).
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Il pense aux changements d'anticipations qui peuvent se produire si les
chefs d'entreprise ne croient pas en la réussite de cette politique
d'investissement.
Lire le texte
« Etant donné les conceptions confuses qui prévalent souvent,
le programme du Gouvernement peut nuire à la confiance et par suite
accroître la préférence pour la liquidité ou diminuer l'efficacité
marginale du capital, ce qui contribue aussi à ralentir
l'investissement privé si aucune mesure compensatrice
n'intervient » page 137).
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Enfin il est conscient des effets de l'ouverture des économies sur
l'efficacité du mécanisme.
Lire le texte
« Dans un système ouvert, en relations commerciales avec
l'étranger, le multiplicateur du flux d'investissement supplémentaire
profite en partie à l'emploi dans les pays étrangers, puisqu'une partie
de la consommation additionnelle s'inscrit au passif de la balance des
comptes » (p. 137).
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